Phia Ménard - Compagnie Non Nova, artiste associée
Metteuse en scène, performeuse et chorégraphe française, Phia Ménard est une artiste dont les créations sont présentées aussi bien en France que dans les grands festivals de la scène européenne et internationale. Fondatrice de la compagnie Non Nova, elle est artiste associée à la Scène nationale de l'Essonne et présentera trois spectacles lors de la saison 2023/2024 autour d’un temps fort qui lui sera consacré.
Phia Ménard est directrice artistique et interprète de la Compagnie Non Nova, qu’elle fonde en 1998 avec l’envie de porter un regard différent sur l’appréhension de la jonglerie, de son traitement scénique et dramaturgique. « Non nova, sed nove » (Nous n’inventons rien, nous le voyons différemment) en est un précepte fondateur. Elle développe un travail singulier sur la transformation et l’expérimentation du corps dans le théâtre.
« Dans une société où le virtuel tend à s’imposer dans l’imaginaire, la performance physique avec des matériaux naturels communs à tous et à toutes, de surcroît indomptables est un moyen d’interpeller nos sens. »
En 2008, elle initie un processus de recherche intitulé « I.C.E » pour « Injonglabilité Complémentaire des Eléments », qui consiste en une approche créative, intellectuelle et imaginative autour de la notion de transformation, d’érosion ou de sublimation de matières ou matériaux naturels comme la glace, l’eau, le vent…et de leurs interactions avec les comportements humains, corporels ou psychiques.
Plusieurs cycles ont été initiés depuis 2008 : les Pièces de Glace, les Pièces du Vent – dont L’après-midi d’un foehn et VORTEX – , les Pièces de l’Eau et de la Vapeur, et les Pièces de la Sublimation avec La Trilogie des Contes Immoraux (pour Europe).
Ses spectacles sont présentés sur les scènes françaises et à travers le monde dans plus de 50 pays. En janvier 2014, elle est promue au grade de Chevalier de l’Ordre des Arts et des Lettres.
Depuis plusieurs années, Phia Ménard élargit sa pratique de transmission ; elle enseigne régulièrement à l’Ecole du TNB à Rennes dont elle est aussi Présidente ; elle est intervenue à l’ENSATT – Lyon, et est sollicitée régulièrement par des Conservatoires ou autres écoles supérieures d’art ou d’architecture. Son projet artistique fait l’objet de nombreux travaux universitaires. En marge de la direction de la Compagnie Non Nova, Phia Ménard répond à des commandes de mises en scène, notamment en 2018 avec la création Et in Arcadia Ego à l’Opéra-Comique, et en 2022 avec Les Enfants Terribles de Jean Cocteau, un opéra produit par la Co(opéra)tive.
Les pièces de glace
Avec sa première pièce du cycle des glaces, P.P.P., Pièce pour une interprète dans un milieu hostile (2008), Phia Ménard jongle et manipule des blocs de glace qui glissent, se transforment et fondent. « Cette première pièce du cycle des glaces est une aventure humaine et technique qui se poursuit depuis 2008. Conditionner les salles de spectacle et leur équipe au rythme imposé par la technique de congélation, refroidir les lieux, gérer les dangers imputables à cette pratique, façonner des jours durant dans le froid des centaines de boules de glace pour chaque représentation.... Jongler de la glace est plus qu’un défi, c’est un dialogue avec une matière se transformant à chaque instant » (Phia Ménard).
Dans Iceman, co-réalisé avec le Collectif La Valise pour leur film Coyote Pizza, Phia Ménard confectionne une armure de samouraï entièrement réalisée en glace translucide, pendant un concours hippique sur l’hippodrome de Nantes (2008). Dans Sacrifice, elle part d’un souvenir d’enfance, celui de fabriquer un château de sable, pour construire un château fait de glace pailletée, tout en luttant contre sa fonte inexorable. Et dans Black Monodie, commandée par la SACD et le Festival d'Avignon en 2010, elle écrit avec Anne-James Chaton une performance pour le Jardin de la Vierge du lycée Saint-Joseph, autour du thème du labeur en s'inspirant des biographies de trois femmes célèbres et du mythe de Sisyphe.
Les pièces du vent
Sur les notes de trois œuvres musicales de Claude Debussy - L’après-midi d’un faune, Nocturnes et Dialogue de la Mer et du Vent -, une maîtresse de ballet donne naissance à une chorégraphie de danseuses et danseurs de plastique propulsés dans les courants d’air. Il s'agit de L’après-midi d’un foehn (2011), dont la première version est née d’une commande de Muséum d’Histoire Naturelle de Nantes en 2008. Phia Ménard imagine alors faire bouger le pelage des animaux inanimés du musée avec de l’air propulsé par des ventilateurs, comme pour leur redonner vie. Elle construit ensuite un personnage attachant et gracieux à partir du façonnage d’un simple sac plastique. Ce matériau est repris dans Laisse les gondoles à Venise (2008), dans lequel elle travaille sur un tourbillon d'air dans lequel vole une marionnette de sac plastique et un parapluie.
Avec VORTEX, Phia Ménard pose la question de l’enveloppe et de l’érosion. Dans cette performance, l'interprète est recouverte de cinq carapaces de matières plastiques au milieu d’un dispositif de ventilation. C’est en se défaisant de ses diverses peaux, en ôtant ses multiples carapaces que cette figure anonyme finit par se révéler, aux autres et à elle-même. Quant à sa pièce Les Os Noirs (2017), dernière pièce du cycle, elle mobilise des matières noirs mouvantes surdimensionnées et esquisse une série de tableaux achromes pour un poème du clair-obscur.
Les pièces de l'eau et de la vapeur
En 2015, Phia Ménard crée Belle d'Hier. Sur la scène, un bal figé d’une trentaine de robes congelées en formes humaines, regardant dans une seule et même direction comme guettant l’arrivée imminente du prétendant, du sauveur. Sous l’effet de la chaleur et du temps, apparaît une chorégraphie de la décomposition de ces robes glacées qui deviennent lentement serpillières gorgées d’eau, perdant toute leur tenue pour laisser apparaître un chaos. L'artiste s'attaque à la transformation d'un mythe, celui du prince charmant. Une thématique reprise dans Saison Sèche, co-écrite avec Jean-Luc Beaujault au Festival d'Avignon en 2018, dans laquelle un rituel met en scène sept femmes tentant de détruire la maison du patriarche.
Les pièces de la sublimation
Le projet global est né de la commande de la Documenta 14 (Kassel, Allemagne), et s’est construit sur la thématique de la manifestation « Apprendre d’Athènes, pour un Parlement des Corps ». Les questions soulevées par cette thématique s’entrechoquent avec les réflexions de Phia Ménard sur l’identité, le corps et la matière, qui constituent ses bases de recherche. Orientée par ce projet de rééducation, elle imagine une série de performances en forme de contes qu'elle nomme La Trilogie des Contes Immoraux (pour Europe), autour de la construction et de la destruction d’une cité : Europe. Dans le premier volet, Maison mère, l'artiste bâtit un village « Marshall » en carton sur mesure, comme on monterait une série de tentes pour des réfugiés. Un lutte contre les lois de la physique jusqu’à parfois recommencer, inlassablement.
Fondée en 1998 par Phia Ménard, la compagnie Non Nova est implantée à Nantes depuis sa création. Elle regroupe autour de ses projets pluridisciplinaires des artistes, technicien·nes, penseurs d’horizons et d’expériences divers. Ce n’est pas un collectif mais une équipe professionnelle dont la direction est assurée par Phia Ménard et Claire Massonnet. L’équipe de quarante individus s’est constituée autour de projets, de rencontres, de la nécessité commune de travailler sur l’imaginaire et de savoir-faire.